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Comme un sentiment de révolte propre à notre époque....
Qaïn

Leconte de Lisle

(Extrait)

...
Je regarde marcher l'antique sentinelle,
Le Khéroub chevelu de lumière, au milieu
Des ténèbres, l'esprit aux six ailes de feu,
Qui, dardant jusqu'à moi sa rigide prunelle,
S'arrête sur le seuil interdit par son dieu.
Il reluit sur ma face irritée, et me nomme :
– Qaïn, Qaïn! – Khéroub d'Iahvèh, que veux-tu ?
Me voici. – va prier, va dormir. Tout s'est tu,
Le repos et l'oubli bercent la terre et l'homme;
Heureux qui s'agenouille et n'a pas combattu !
Pourquoi rôder toujours par les ombres sacrées,
Haletant comme un loup des bois jusqu'au matin ?
Vers la limpidité du paradis lointain
Pourquoi tendre toujours tes lèvres altérées ?
Courbe la face, esclave, et subis ton destin.
Rentre dans ton néant, ver de terre! Qu'importe
Ta révolte inutile à celui qui peut tout ?
Le feu se rit de l'eau qui murmure et qui bout;
Le vent n'écoute pas gémir la feuille morte.
Prie et prosterne-toi. – Je resterai debout !
Le lâche peut ramper sous le pied qui le dompte,
Glorifier l'opprobre, adorer le tourment,
Et payer le repos par l'avilissement;
Iahvèh peut bénir dans leur fange et leur honte
L'épouvante qui flatte et la haine qui ment;
Je resterai debout ! Et du soir à l'aurore,
Et de l'aube à la nuit, jamais je ne tairai
L'infatigable cri d'un coeur désespéré !
La soif de la justice, ô Khéroub, me dévore.
Ecrase-moi, sinon, jamais je ne ploierai !

...

Tag(s) : #Dans mon grenier, #Leconte de Lisle
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