Armes blanches

Faites de moi un homme d'acclimatation
Faites de moi un homme de respiration
des hautes senteurs de la savane
Faites de moi un homme d'ablution de source fraiche
Ô forêt vierge et folle de mes poèmes en bandoulière
Ô minerai de sisal noire en pierre imparfaite de nos coutumes primitives
Fini l'esclavage des mots
Fini la saison du bégaiement
J'arrive à la taille des arbres de la parole taillée sur mesure
J'arrive à la démesure des crachats
Je crache sur le venin du silence
Oui je suis arrogant .
Oui . Je le suis
À l'aune des hommes qui ont fait ce temps
À l'aune de Depestre , de Senghor,
de Césaire Etc. Etc . Etc.
Je refais ce chemin de Damas
Et maintenant j'expie tous mes crimes
L'épaisseur de mon nez
La vigueur de mes muscles d'airain
La grossièreté de ma bouche lippue Je crache sur l'occident
Et le cynisme de ses maitres
Qui ont trente siècles de civilisation et et d'esclavage Socrate Platon Euripide Eschyle
Nous les nègres avons trop joué aux marionnettes
Nous ne serons plus les victimes
Nous nous mettrons en état de poésie
Et nous lapiderons la stèle de la décadence de leurs théories à grands coups de pierre
Et nous apporterons le pain futur aux hommes
Et nous danserons nous crierons.

Manuel Ildevert Toussaint - 
(Extrait du recueil inédit Torches)