J'erre en terre profonde
J'entre en femme sevrée
Des îles aboient au loin
libres de leurs chaînes beuglantes
Par la transe des marées
j'erre en fécondité
ta bouche verticale à l'horizon
murmure d'éternité
me prie de m'approcher
de jeter l'ancre en profondeur
femme
rivée à l'horloge
l'angoisse dans les yeux
tu attends de la source à la mer
le passage des oiseaux
la délivrance des éclairs
et ce baiser de pourpre
au milieu de l'orage
tu as la nuque douce
la caresse profonde
du soleil jusqu'au bout des ongles
et la tendresse
femme d'envies femme d'ivresses
la tendresse qui se prolonge en toi
comme un immense fleuve
allant en silence épouser tes secrets
femme-colline
dans ta poitrine bat
ton cœur anxieux de mère
sur la paupière de l'ange
un oiseau s'est posé
et tu retiens son aile
pour empêcher le cri
déjà sous ta gorge l'on devine
le blanc balancement du lait
un filet mince de sang chaud
venu de la niche utérine
JEAN-PAUL KERMARREC