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"Et je marchais, petit bonhomme, derrière ce vieux bonhomme adorable, qui me donnait une cigarette pour éloigner les moucherons et autres volants voraces des sous-bois tempérés...
Je marchais derrière et je lui composais des odes, je lui composais des hymnes..."

 

                                                                                                                                          
           C'est le onzième jour de mai qu'il s'envola le cœur épuisé d'avoir tant donné. Il m'avait prévenu pourtant, neuf mois plus tôt, qu'on ne se reverrait pas...
Ce n'était  pas dans ses habitudes et moi j'aurais du le croire. Mais je suis arrivé trop tard devant ce corps sans vie qu'il avait désert
é et que je n'ai pas voulu voir mettre en terre. Il était là tout près et si mes yeux qui le cherchaient dans l'air ne le virent point je le sentais tout autour de moi.


Quelques jours plus tard, de retour chez moi j'ai commencé à éprouver un sentiment bizarre, un besoin irrépressible de sculpter dans le bois son visage.
Il me restait un morceau d'Iroko, je me suis mis à l'œuvre sans tarder.
Fébrilement, tenant le ciseau et le maillet, je travaillais
comme un possédé, comme si ma vie dépendait de l'achèvement de cette sculpture. Je travaillais sans rien y voir, les yeux embués de larmes.
 
Le troisième jour, toujours halluciné, je butais sur une expressi
on, sur un détail de son visage que j'étais incapable de reproduire.  Alors la rage me prit et sans regarder j'ai frappé au hasard comme pour briser cette planche, mettre fin à la torture tout en insultant le ciel. C'est alors que je m'aperçus avec effarement que je venais d'obtenir l'effet recherché et que vint l'apaisement.

Croyez le ou non mais je sais qu'il était là, tout le temps que dura mon travail.
Il s'appelait Lucien, c'était mon grand père et i
l me manque...

 

 

Tag(s) : #Mes textes, #laurent Chaineux
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